Ce
texte, édité en 1991, aux éditions de la Découverte n’a
malheureusement rien perdu de son actualité, bien au contraire. Les
tragiques événements qui nous sont rapportés quotidiennement nous le
rappellent cruellement. Réactualisé et enrichi par l’auteur, qui a pris
en compte les derniers développements des drames qui envahissent le
monde, il porte un regard sans concession sur le délitement de nos
sociétés.
L’utilitarisme
et l’économisme, propres à la civilisation matérialiste occidentale,
tendent à uniformiser de plus en plus la société.
Cette formidable machine à réduire les cultures, les modes de vie à
des produits de consommation, est aussi une machine à exclure. Elle crée
des naufragés du développement que l’on trouve partout : dans les
banlieues des métropoles, dans les bidonvilles du tiers monde, dans les
réserves où survivent les espèces humaines mal protégées en voie de
disparition. C’est le monde des gagnants qui fabrique de plus en plus
d’exclus. Face à ce « monde des gagnants », il existe une autre réalité
pour les naufragés de cette société consumériste, ces exclus du système
dans la « nébuleuse de l’informel ». En effet, la pratique économique
reste profondément enchâssée dans un tissu de réseaux de solidarité et
de réciprocité reconstruit sur de nouveaux imaginaires bricolés
avec plus ou moins de bonheur.
Cette
tentative de recréation du lien social est source d’espoir : l’on
peut entrevoir les prémices de ce que pourrait être
l’après-développement, tel un véritable laboratoire des avenirs
possibles. Devant les échecs patents de notre civilisation, il est
primordial de remettre en perspective nos principales thèses
philosophiques, économiques, anthropologiques et sociales et de changer
de paradigme sur les notions de progrès et de développement. C’est un
passage obligé et indispensable pour essayer de reconstruire un chemin
nous menant à un monde postoccidental.
L'auteur :
Serge
Latouche est l’un des « contributeurs historiques » de la Revue du
MAUSS ; professeur émérite à la faculté de droit, économie et gestion
Jean-Monnet de l’université Paris-Sud, il a été cofondateur de la revue
d’étude théorique et politique de la décroissance Entropia. Il a écrit
de nombreux ouvrages dont Pour en finir avec l’économie avec Anselm
Jappe aux Éditions Libre & Solidaire. Serge Latouche a développé une
théorie critique envers l’orthodoxie économique, et a
réfuté l’économisme, l’utilitarisme dans les sciences sociales et la
notion de développement. À travers une argumentation théorique et une
approche empirique nourries de nombreux exemples, il dénonce les notions
d’efficacité et de rationalité économiques. Il est un des penseurs les
plus connus de la décroissance, thème principal de ses derniers
ouvrages.